
Canyon Candor Chasma
Bonjour à toutes et à tous ! Bienvenue dans ce nouveau rapport pour le deuxième épisode de « Interview avec ». Dans l’épisode d’aujourd’hui nous allons discuter avec Julie Levita, notre HSO (ou agent santé-sécurité).
Mais avant, laissez moi vous raconter un peu notre Sol 5 sur Mars.
Premièrement je pense qu’il est intéressant de noter que ce matin nous n’avons pas eu notre entrainement sportif quotidien. Je cite notre HSO : « il faut laisser notre corps se reposer avant la semaine d’entraînements qui arrive »
Je pense que c’était une bonne décision et tout le monde a beaucoup apprécié le fait de pouvoir rester un peu plus longtemps au lit ce matin. En effet, cette semaine a été éprouvante pour tout le monde et nous sortons tous assez fatigués de cette première semaine (du moins pour ma part).
Ce matin de répit était d’autant plus important qu’il fallait être prêt pour l’EVA de ce matin qui a été longue et physiquement éprouvante. Maxime, François, Marion et Clément sont partis ce matin explorer Candor Chasma, un canyon se situant aux alentours de la station. Sur Terre, certains appelleraient cette sortie une randonnée, une « bonne randonnée » probablement. Mais sur Mars, avec la combinaison spatiale sur le dos et toutes les autres contraintes dont nous avons déjà parlé dans de précédents rapports, c’est une tout autre histoire. Ils ont passé près de trois heures et demi dehors, à explorer le labyrinthe à l’intérieur du canyon. Ils sont rentrés de cette EVA exténués et tout le monde a fait la sieste une fois le déjeuner avalé. Et pourtant, j’aurais tant voulu être parti avec eux ce matin. Je suis convaincu que vous comprendrez pourquoi en voyant les photos qu’ils ont prises là-bas.
Mais il fallait absolument que quelqu’un reste au Hab. En effet, s’il devait leur arriver quelque chose, ça serait aux personnes restées dans le Hab (en l’occurrence Julie et moi) d’intervenir. Ce canyon vaut vraiment le détour et j’espère avoir l’occasion de le voir de mes propres yeux lors d’une prochaine EVA.
Cet après-midi, malgré leur état de fatigue, François et Maxime ont passé tout leur temps au RAM à essayer de faire fonctionner l’imprimante 3D. Souvenez-vous, la dernière fois je vous ai dit qu’il nous fallait absolument trouver un moyen de faire fonctionner l’imprimante 3D afin d’imprimer un entonnoir spécial pour que Julie puisse recycler l’eau ! Pendant que j’étais en train d’interviewer Julie à l’étage inférieur du Hab, ils ont travaillé d’arrache-pied et leur persévérance a fini par payer ! Ils ont finalement réussi à imprimer leur première pièce de test. Demain, ils vont pouvoir imprimer l’entonnoir de Julie, rendant son travail de recyclage de l’eau beaucoup plus aisé.
François et Maxime travaillent sur l'imprimante 3D
En effet, Julie n’a pas de temps à perdre, elle est extrêmement occupée à créer des entraînements sportifs, des séances de relaxation et des activités de cohésion pour son équipage, comme une bonne HSO. En parlant de ça, voyons ce que nous nous sommes dit cet après-midi pendant l’interview :
« - Salut Julie, comment ça va ?
- Ça va super bien ! Je suis super contente de faire cette interview avec toi aujourd’hui !
- Tant mieux ! Je suis très content que tu aies accepté de faire cette interview ! Julie, est-ce que tu peux te présenter à ceux qui ne te connaissent pas encore ?
- Avec plaisir ! Je m’appelle Julie Levita, je suis étudiante en césure à l’ISAE-SUPAERO, j’ai fait deux stages dans la SSA : surveillance de l’espace, tout ce qui est catalogage de débris, et évitement de collision, je suis passionnée par le sport d’équipe depuis petite, au lycée je faisais du handball à haut niveau (championnat de france). Aujourd’hui, je suis HSO c’est-à-dire Health and Safety Officer de l’équipage 240, c’est-à-dire Agent Santé-Sécurité.
- Ok super ! En parlant de ça, est-ce-que tu peux nous expliquer en quoi consiste ton rôle d’agent santé-sécurité (HSO) ?
- Pour moi, le rôle d’HSO se décline en 3 parties.
La première partie concerne la santé physique. Donc tout ce qui est blessures, symptômes, ou mal-être en général. Dans la MDRS, la politique du bon HSO c’est de prévenir plutôt que guérir. La plupart des blessures se font à cause de manque de sommeil, de déshydratation, ou de manque de sucre. Un bon HSO se doit donc de vérifier que tous les membres d’équipage prennent soin d’eux. Dans le contexte covid d’aujourd’hui, je dois de plus prendre tous les matins la température et le taux d’oxygénation des membres d’équipage, pour m’assurer qu’il n’y a pas de problèmes.
La deuxième partie concerne la santé mentale, c’est la partie qui consiste en mon activité principale : nous sommes enfermés dans une station, livrés à nous même, avec des ressources en énergie, en eau et en nourriture rationnées, loin de nos proches, sans moyen de communication avec eux. Psychologiquement, on peut vite être très affectés par ce contexte. Il est important d’installer une routine et de mettre en place des activités qui peuvent nous remotiver, nous faire nous sentir mieux : sport, méditation, activités de cohésion, jeux de détente. C’est aussi à cela que sert le planning créé par le commandant. De plus, un bon HSO selon moi doit être attentif aux autres et aux signes de baisse de moral. C’est un contexte déstabilisant, il est normal que certains aient des moments de faiblesse, c’est dans ces moments que le HSO doit être disponible.
Enfin, la dernière partie concerne la sécurité, qui est la priorité numéro 1 à la MDRS, avant la simulation. Cette partie est assurée en collaboration avec d’autres membres, dont l’ingénieur de bord, et le commandant. Je dirai qu’il s’agit de l’élaboration et de l’application des protocoles qui nous empêchent d’être en danger. Par exemple, la vérification régulière des alarmes, du niveau d’eau, et du niveau d’énergie, qui sont réalisés par François notre ingénieur de bord. Les protocoles les plus importants sont ceux qui définissent notre notion du danger. Ceux-là sont en partie réglementés par la MDRS, mais il nous faut aussi faire des choix : Si un membre d’équipage perd son micro lors d’une EVA, que fait-on ? C’est le genre de question qu’il faut se poser, ensemble, et dont les réponses deviendront indiscutables lors de la mission.
- Super, ça me paraît très clair ! Et plus personnellement, pourquoi as-tu voulu être la HSO de cet équipage ?
- J’avais demandé à être HSO pour plusieurs raisons. D’abord, j’ai un diplôme de secouriste et ma formation m’a appris à développer des réflexes pour réagir en cas d’urgence : malaise, arrêt cardiaque, hémorragie, brûlures...
Ensuite, c’est parce qu’en pratiquant le handball pendant plusieurs années, j’ai connu et été témoin de blessures qui peuvent être typiques de blessures en EVA : entorses, foulures, ou même fracture aux poignets, aux chevilles, aux bras… Avec l’expérience, je peux souvent connaître la « gravité » de la blessure, et dans les cas les moins graves, je pense pouvoir soigner ou apaiser les douleurs si besoin.
Enfin, je pense que la raison principale pour laquelle j’ai demandé à être HSO, c’est l’aspect humain de ce rôle. Je pense être quelqu’un d’extravertie, qui aime les gens. J’ai l’impression de prêter attention à eux, d’être plutôt quelqu’un de sensible et compréhensive. De plus, je me sens proche de tous les membres de l’équipage, il est d’autant plus facile pour moi d’être à leur écoute. Je crois que transformer le fait de faire attention aux autres en une responsabilité fait assez sens avec ma personnalité.
- Je trouve également que ce rôle te va parfaitement bien ! On arrive déjà à la dernière question Julie ! Je me demandais quelle était, pour l’instant, ta partie préférée du rôle de HSO ?
- Je te l’ai dit, mon activité principale, ce sont les activités du planning mise en place pour notre bien-être émotionnel. J’aime beaucoup les séances de sport, c’est un bon moment qui permet de bien se réveiller, et c’est en plus agréable de se dépenser lorsqu’on est confinés. J’aime bien les séances de médiation également, je sens qu’elles font effet sur moi, et je dois dire que mes équipiers sont adorables et jouent vraiment le jeu ce qui est plaisant. Mais ce que je préfère, ce sont les activités de cohésion. Ce sont des vrais moments de détente, chaleureux, et j’aime à croire que l’équipage en sort plus soudé à chaque fois ! Et pour être tout à fait honnête, je tire une certaine satisfaction de vos retours positifs sur ces activités.
- Ces retours positifs sont on ne peut plus mérités si tu veux mon avis. J’aime beaucoup les activités que tu nous proposes, que ce soit la séance de sport du matin ou les jeux de cohésion. Je trouve que tu fais du super travail en tant que HSO et je t’en remercie ! Merci également pour cette interview, j’ai passé un bon moment en ta compagnie !»
Voilà comment s’est terminée cette super interview, j’espère qu’elle vous a plu ! Les interviews des autres membres de l’équipage arrivent très bientôt alors ne ratez pas les prochains rapports !
