9 Mars 2020
Sol 8: Life on Mars?
De notre point de vue, nous sommes sur Mars. Tout dans la limite du raisonnable est fait pour que la MDRS soit comme une vraie base martienne. Nous avons des protocoles pour tout, des communications de sécurité dès que nous nous déplacons aux mesures des grammes de plantes récoltées dans la serre. Nous avons de la nourriture en poudre, ennuyeuse à mourir, qui teste chaque jour notre créativité culinaire. Nous avons à longueur de vue des paysages multicolores magnifiques, mais secs et vides. Nous avons une quantité limitée d’eau, et aucun air frais à respirer. Nous avons aussi la connexion internet douteuse que l’on pourrait attendre à des millions de kilometres de la terre. Somme toute, on ne se sent pas du tout à la maison.
Pourtant, de quelques petites manières, ça reste inévitablement chez nous. La MDRS est dans le désert, et c’est certainement sec, mais nous sommes toujours sur terre, et il y a donc de l’eau. Et là où il y a de l’eau, il y a de la vie. Dans nous sorties, on a fréquemment vu des plantes ou des traces de pas d’animaux. On a l’occasionnel insect se perdant dans le Hab. Et, dans les jours de chance comme hier, on voit de nos yeux des animaux, comme l’antilope que nous avons vu courir grâcieusement alors que nous roulions en rover. C’est drôle de se dire que c’était le premier nouveau vertebré que nous voyions depuis une semaine. Quand on arrive dans un lieu si aride et qu’on trouve, en creusant un peu, que la vie persiste, on réfléchit vite à comment une forme de vie aurait bien pu se développer sur Mars quand les conditions étaient propices.
Tristement, les hommes ne laissent jamais la nature tranquille. Sans compter la base de recherche au milieu de nulle part, il y a d’innombrables traces de vie humaine à ceux qui les cherchent. Chaque équipe d’EVA revient avec un sac plastique, des papiers, ou même une immense boîte en plastique, abandonnés et laissés pour une éternité à se décomposer. On n’est simplement pas capables de garder un lieu propre.
Nous avons la chance d’être ceux les plus proches de l’expérience d’une vraie exploration de Mars, malgré les quelques choses qui nous encombrent. Ici, les choses sont exaltantes : l’exploration quotidienne et la recherche scientifique font passer les journées à toute vitesse. Mais ce n’est pas un lieu de vie agréable, et ça ne devrait pas l’être.Le confort est loin d’être la priorité, et il ne devrait pas l’être. On peut espérer voir une colonie martienne dans les décennies qui viennent, mais c’est sans espoir d’y imaginer la vie aussi douce que sur Terre. La vie pérennisée sur une autre planète est un pas en avant excitant, mais ne remplacera jamais vivre sur la planète où nous avons évolué pendant des millions d’années pour être. Il n’y a aucun endroit comme la maison, et nous nous en rendons compte tous les jours dans la MDRS. Nous pouvons espérer que les premiers mots sur la surface Mars interpelleront ceux restés dans le berceau de l’humanité : “Prenez soin de chez nous pendant qu’on est partis, il n’y a pas meilleur lieu de vie”.
Auteur: Clément Plagne, Journaliste